LO N°464 – 14/11/2011
••••••••••
UN TEXTE POUR LUTTER CONTRE LA CRISE
Apparemment la plus claire description de "la crise"… le démontage des idées qu'on nous martèle en guise de purge à avaler… (la faute aux agences de notation… la faute aux dépenses publiques…) et des propositions concrètes pour en sortir. Que demander de plus ?
••••••••••
Capté sur le blog
http://www.liberation.fr/economie/01012369227-comment-sortir-les-etats-de-l-emprise-des-marches-financiers
••••••••••
Comment sortir les États de l’emprise des marchés financiers
Par Thomas COUTROT Coprésident d’Attac et Pierre KHALFA Coprésident de la Fondation Copernic
Le mois d’octobre a vu la crise de la zone euro s’aggraver considérablement et les agences de notation s’en donner à cœur joie : dégradation de la note de l’Espagne et de l’Italie, menace sur la Belgique, «mise sous surveillance» de la France qui risque ainsi de perdre son triple A. Tout a déjà été dit sur le rôle des agences de notation. Aveugles lors des crises financières qu’elles ont été incapables d’anticiper, donnant la note maximale à la banque Lehman Brothers à la veille de son effondrement, certifiant l’innocuité des produits financiers hautement toxiques, baignant en permanence dans le conflit d’intérêt, leurs déclarations devraient susciter l’hilarité générale. Pourtant, gouvernements et institutions européennes, tout en les dénonçant et en promettant de les mater, persistent à se prosterner devant elles.
C’est que les agences de notation, aussi discréditées soient-elles, jouent un rôle indispensable au fonctionnement des marchés financiers. Le problème n’est pas de savoir si elles ont raison ou tort ou si leurs jugements sont basés sur une analyse objective de la situation. Il vient du comportement même des acteurs de la finance qui ont besoin d’une autorité extérieure pour orienter leurs décisions grégaires. Les agences de notation ne jouent pas le rôle de thermomètre, mais d’un virus qui fait monter la fièvre de la cupidité, laquelle pousse à la formation de bulles dans les moments d’euphorie boursière, et qui déchaîne une panique incontrôlée dans les moments de doute. Le problème, ce ne sont pas les agences de notation, mais les marchés financiers. Il est donc criminel d’avoir mis les dettes publiques entre leurs mains.
Car, il faut insister, ce sont les gouvernements qui ont fait ce choix, ce sont eux qui ont permis aux marchés de développer leur capacité de nuisance.
En France, une réforme de la Banque de France, votée en 1973 sous l’impulsion de Giscard d’Estaing, ministre des Finances de Pompidou, interdit au Trésor public d’emprunter directement à la Banque de France à des taux d’intérêt nuls ou très faibles. La Banque de France ne peut donc plus financer par de la création monétaire les déficits publics. Le gouvernement français est dès lors obligé de faire appel aux marchés financiers, c’est-à-dire à des banques privées et ce, aux taux d’intérêt du marché. Il s’agit d’un acte fondateur et destructeur car il inaugure la mainmise des marchés financiers sur les Etats. Cette disposition allait être intégralement reprise lors de la création de la Banque centrale européenne (BCE), puis dans tous les traités européens.
On a donc abouti à une situation hallucinante. Les États ne peuvent pas être financés par la BCE ; mais celle-ci peut par contre refinancer les banques privées à de très faibles taux. Ces dernières prêtent ensuite aux États à des taux nettement supérieurs, voire carrément usuraires. L’Union européenne se place volontairement sous l’emprise des marchés financiers.
Cette emprise allait être d’autant plus grande qu’une contre-révolution fiscale s’est déployée depuis plus d’un quart de siècle. Son fil directeur a été de baisser par de multiples moyens les impôts payés par les ménages les plus riches et par les entreprises, en particulier les plus grandes. L’impôt sur le revenu est devenu de moins en moins progressif avec la diminution du nombre de tranches et les baisses successives du taux marginal supérieur. L’impôt sur les sociétés, véritable peau de chagrin, pèse trois fois plus lourd sur les PME que sur le CAC 40. Résultat imparable, l’État s’est appauvri : ses recettes représentaient 15,1% du PIB en 2009 contre 22,5% en 1982. On trouve là une des raisons de l’accroissement régulier de la dette publique avant même la crise financière. Car, contrairement à une antienne dont on nous rebat les oreilles, ce n’est pas l’explosion des dépenses publiques qui a creusé les déficits. Avant la crise, elles avaient même tendance à baisser : 55% du PIB en 1993, 52% en 2007. La crise, dont il faut rappeler qu’elle trouve son origine dans les délires de la finance, a évidemment gonflé la dette. Baisse des recettes fiscales dues à la récession, plan de relance pour éviter la dépression et, enfin, sauvetage des banques se sont combinés pour arriver à ce résultat.
Alors que faire maintenant pour empêcher les prophéties auto réalisatrices des marchés de se concrétiser ? Tout d’abord, il faut acter que les plans d’austérité, au-delà même de leur caractère socialement inacceptable, sont inutiles. Et c’est tout le paradoxe de la situation. Les marchés veulent que les déficits publics soient réduits pour être sûrs que les États puissent payer la charge de la dette, mais ils s’inquiètent du fait que les mesures prises vitrifient l’activité économique. Face à ces injonctions contradictoires, il ne sert à rien de vouloir rassurer les marchés, puisque plus on les rassure, plus ils s’inquiètent. La seule solution est de sortir les États de leur emprise.
• Il faut, pour cela, tout d’abord européaniser et monétiser les dettes publiques. La BCE et les banques centrales nationales doivent pouvoir, sous contrôle démocratique, financer les États et les politiques publiques européennes.
• Concernant le stock de la dette existant, un audit citoyen doit pouvoir déterminer la part de la dette qui est illégitime, et donc doit être annulée, et celle qu’il faudra rembourser, la BCE pouvant dans ce cas la racheter.
• Les banques doivent être mises sous contrôle social afin qu’elles se tournent vers les financements de l’activité productive et la transformation écologique de la société.
• Enfin, il faut une réforme fiscale d’ampleur qui redonne des marges de manœuvre à l’action publique.
Ces orientations supposent de rompre avec tout ce qui a fait l’orthodoxie néolibérale de ces dernières décennies. Les mouvements sociaux qui commencent à secouer l’Europe devront l’imposer.
* ATTAC : Association pour la Taxation des Transactions financières et pour l’Action Citoyenne ; promeut et mène des actions de tous ordres en vue de la reconquête, par les citoyens, du pouvoir que la sphère financière exerce sur tous les aspects de la vie politique, économique, sociale et culturelle dans l’ensemble du monde.
** fondation COPERNIC : Depuis 1998, La Fondation Copernic travaille à « remettre à l’endroit ce que le libéralisme fait fonctionner à l’envers ». Soucieuse de son indépendance et restant par principe hors du jeu électoral, Copernic n’est liée à aucun parti politique, aucun syndicat, aucune association mais s’adresse à toutes les organisations politiques, syndicales et associatives, et surtout à toutes celles et ceux qui ne se résignent pas à l’ordre néolibéral.
••••••••••
"Celui qui contrôle l'argent de la nation contrôle la nation ".
Thomas Jefferson (1743-1826), 3ème Président des Etats-Unis (Que ça soit lui en vrai qui l'ait dit ou un autre ou personne, on s'en fout !)
Pompe à phynance et machine à décerveler.
1 commentaire:
Question: Y a t-il moyen de revenir sur cette loi Pompidou-Giscard de 1973, reprise ensuite dans le traité de Maastricht? Il s'agissait véritablement d'une privatisation de la dette. Autre question: pourquoi même les gens de gauche qu'on entend dans les médias ne remettent-ils pas en question cette loi qui permet d'enrichir toujours les mêmes et autorise le hold-up continu des contribuables? L'autre jour, Giscard, invité du JT de France 2, était interrogé sur la crise de la dette. Outre que les questions du journaliste étaient superficielles et complaisantes, jamais n'a été abordée le sujet de cette loi votée par lui et Pompidou. Sur certains sujets, les médias sont véritablement baillonés.
Enregistrer un commentaire