… "Rêver 2074
/ Une utopie du luxe français / par le Comité Colbert" (et quelques
écrivains et écrivaines…).
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SFF
Dans
les commentaires, est souvent soulevée la question de la SF française et de sa
diffusion ou non à l'étranger. Grace à ce plan, on va aller à New York et
montrer aux Américains qu'on existe ! N'est-on pas dans le ridicule,
là ? (Enfin… je n'en sais rien… et je m'en fous un peu, en fait.)
Et,
a contrario, est soulevée la question de la "pureté" de la SF :
ceux qui voudraient que les auteurs-de-SFF ne se commettent pas dans ce genre
de plan. Euh… je crois que ça aussi je m'en fous un peu. Ce qui est en question
ce n'est pas la SF, ni même les auteurs en général, c'est tout le monde – nous tous, dans le monde où nous vivons. Je ne
vis pas "dans la SF", même si le monde de la SFF est quelque chose
comme ma famille d'intellect. D'ailleurs, si ce n'était pas le cas, je n'aurais
pas mis un pied dans la discussion, je ne serais même pas au courant, si ce
plan avait concerné le polar, la littérature générale, le rock ou la peinture
contemporaine. (Quoique… Je pense à la fondation Vuitton récemment inaugurée en
grande pompe – à fric – dans le "domaine des dieux" de Boulogne,
objet promotionnel et niche fiscale grand format, qui me semble ressortir de la
même démarche : produire un monument funéraire à la cause de l'art, de
l'architecture et de la culture. (Cf article de Christophe Catsaros dans
Courrier International 1255, 20-26 nov. 14). Que faire de ce cristal
impossible, comme courbé par le vent, où ne passeront jamais que du vent et des
millions ?)
Quant
au fait que ce soit "l'industrie du luxe français" qui sollicite la
SF française… si un plan du même genre était lancé par le lobby promotionnel de
la course de F1, la défense du tennis de niveau international et ses évadés
fiscaux, la chirurgie esthétique, la Scientologie ou le Transhumanisme, ça
serait pareil : il y a des moments où il faut choisir son camp.
…
Et pourtant SI : que ce soit la SF fait quand même question. Sans idéaliser, la
SF, parlant du présent/futur, est la littérature engagée par excellence. J'en
attends autre chose. Elle se complait, dit-on, dans les lendemains
foireux et leur dénonciation ? C'est souvent vrai, car "la fin
du monde, c'est maintenant". Ou alors c'est le pur dépaysement – je ne
crache pas dessus, mais je ne serais que trop heureux de lire une anticipation,
même moyennement crédible, qui m'évoquerait une société sans SDFs, où tout le
monde aurait à manger, un monde sans terroristes, sans pollution, sans laideur,
sans esclaves… et sans luxe. Non, même avec : mais je conditionnerais
volontiers la possibilité du luxe à tout le reste, à d'abord tout le reste. Si on avait tout ça, si on avait d'abord
réglé toutes ces questions, on pourrait se permettre un certain luxe, "se
payer le luxe" de –. (Je pense par exemple à la novella de P.J. Farmer
"70 ans de decpop".)
Je
suis sûr qu'il y a plein d'auteurs qui pourraient l'écrire, cette utopie
positive… mais – c'est con – il n'y aurait personne pour la financer.
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L'UTOPIE
Utopie,
uchronie… Ces mondes au conditionnel… Je ne suis pas contre l'utopie, mais à
considérer seulement comme objet littéraire, et ni SF, ni prospective ou
futurologie.
Nostalgie
et espérance, les deux "péchés capitaux".
L'uchronie
est fondée sur la nostalgie, les regrets, un fantasme de futur antérieur, ou
plutôt de "futur du passé". Pure illusion : le passé n'existe
pas, le voyage dans le passé n'existe pas. Dans le passé il n'y a aucun
POSSIBLE. (Le facteur temps ne sonne jamais deux fois, comme dit Étienne
Klein…)
L'utopie
anticipative se fonde sur l'espoir, l'espérance (comme on dit en Christianie),
elle présente un possible situé dans un futur (qui n'existe pas non plus). Mais
elle est toujours fondée sur une théorie, un idéal ou une idéologie, voire un
miracle-mirage, et, à l'usage, elle s'avère toujours dystopique. Ici, le
"miracle", la solution de continuité imposée à l'histoire prévisible,
semble être la Pandémie… dont on sait peu de choses, sinon qu'elle aurait
éradiqué une partie de la population et que certains y auraient acquis des
pouvoirs psi, ce qui fait un peu beaucoup penser à la "Grande Terreur
Primitive" des "Futurs mystères de Paris" de Roland C. Wagner.
Mais
le "après la Pandémie" me fait penser aussi à cet "après la
crise", ou "une fois la crise passée", que nous serinent les
politiques, ce qui prouve leur incompréhension profonde de ce qu'il se passe.
La crise est permanente, elle est le fonctionnement normal du capitalisme… Il
n'y a pas d'"après la crise".
Une
anticipation positive ne me dérange pas, a priori. L'ennui c'est qu'elle soit
sponsorisée par le commerce du luxe et présentée comme telle : c'est le monde
dont rêvent les directeurs commerciaux de LVMH, de Chanel, etc.… J'aimerais
mieux celle des AUTEURS.
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NAÏVETÉ
?
La
question de la naïveté (ou au moins ingénuité) se pose aux différents niveaux :
le producteur CC, les écrivains, les lecteurs (à l'occasion commentateurs).
Comment
pourrait-on NE PAS faire une lecture politique, sociale, sociétale, économique
– "idéologique" – d'un ensemble de textes suscités, financés et
publiés par le commerce du luxe. Il en serait de même pour des textes commandés
par le Ministère des Armées, le CEA, le Vatican ou la Sciento… ou le mouvement
Transhumaniste (chez qui je trouve d'ailleurs une certaine similitude de
démarche… Toutes les utopies se ressemblent…) Même si le CC avait (ingénument
ou cyniquement) donné carte blanche aux auteurs, du style "Vous pouvez
écrire tout ce que vous voulez, même dire du mal de nous (sans citer de
marques, bien sûr)", il n'en resterait pas moins que la chose serait
financée, présentée et éditée et signée par le Comité Central du Parti du Luxe,
et donc, pour l'écrivain comme pour le lecteur, entachée de cet a priori. Le
cadre impose le sens – on n'y échappe pas.
Guy Debord : « Est récupéré qui veut bien »
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(AUTO)SUBVERSION ?
J'ai
suggéré par ci par là que certains écrivains avaient réussi à subvertir
discrètement les contraintes, à trahir leur commanditaire, à détourner la
commande. Exprès ou non, peu importe. (Là encore, naïveté et cynisme,
paradoxalement, peuvent très bien s'entendre…) Il est possible que les
commanditaires n'aient pas décelé ces glissements subversifs, éblouis par la
poudre aux yeux des placements de produits… le plus superficiel du contenu.
Mais c'est normal : le monde du luxe est le monde de la superficialité, du
clinquant. Le riche se laisse éblouir par sa propre brillance. Ont-ils
seulement lu ou se sont-ils contentés, pour être heureux, de repérer les termes
comme joailler, Place Vendôme et les néologismes d'Alain Rey…?
Pourtant
c'est bel et bien l'idée de luxe qui est sapée de l'intérieur, par moment; par
une ironie discrète, des clins d'œil, du too much… Il ne pouvait pas en être
autrement, tant l'idée est creuse, vide de sens, sans substance humaine et
fictionnelle. Ce serait assez réjouissant, finalement.
Je
crains hélas qu'à la finale, ce soit quand même le Comité qui gagne. On
n'arrive jamais à trahir son maitre. On a signé le contrat, comme un pacte avec
le diable ou au moins un pacte de non-agression, on se croit bien rusé, capable
de détourner les contraintes, d'exploiter le système… puis quand on se sent
partir trop loin vers la liberté, on fait une concession au maitre, par peur ou
par honnêteté, pour respecter le contrat, alors on se trahit soi-même. Le
diable gagne toujours, à la fin…
Ça
me fait un peu penser au "pacte de responsabilité" signé par un
gouvernement de gros naïfs et qui s'aperçoit tout à coup – Oh ! Ça alors !
– que le lobby MedefPatronatGattaz n'a aucune intention de jouer le jeu et en
demandera toujours plus sans rien donner.
…
Bon, ce n'est que de la littérature… (me dis-je pour
me rassurer…)
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ACHEVER LA
SF ?
À un moment
où on peut se demander s'il est encore possible d'écrire de la SF, à part du
steampunk, tant la réalité s'en est rapprochée, voici que la SF se dilue dans
le dérisoire, produit une sorte de merveilleux économico-techno-scientifique de
basse intensité. La technique comme magie : j'appuie sur le bouton, que la
lumière soit ! Je clique sur un truc, je prends un selfish et je l'envoie
à tous mes copains ! Je mets du parfum bourré de phéromones, je séduis
toutes les filles…
De
toute façon, était-il possible d'écrire "de la SF", dans ces
conditions ? Les auteurs auraient du se poser la question. Mais c'est que,
une fois pour toutes, CECI N'EST PAS DE LA SF. Et donc il y a tromperie et ce
rassemblement de textes étiquetés SF font du mal à la SF.
Si
tout cela n'était QUE de la SF, que de la littérature, tout irait bien… Mais (je
reviens au contexte et je me répète) c'est sponsorisé, mandaté par un groupe de
pression (lobby) commercial, et donc c'est là qu'est le SENS de l'affaire, TOUT
le sens = de la PROPAGANDE, quelle que soit la prétention à la pureté artistique
que l'on revendique. Il n'y a pas de texte pur, pas de texte sans contexte, pas
d'écriture sans idées derrière la tête, pas de lecture sans interprétation.
Peut-on écrire, publier et lire sans la conscience de tout cela ?
Et
il y a autre chose encore. Pourquoi taper là-dessus, sur les incohérences,
insuffisances ou autres fantaisies des textes, alors que j'en admettrais bien
plus, de plus graves ou de plus déconnantes sur des tas d'histoires de SF,
aussi bien type Star War que Philip K. Dick ? Comme si j'exigeais de cette
"antho" ce que je n'exigerais pas d'histoires de SF
"normales"… c'est-à-dire des mêmes auteurs ou d'autres, des histoires
distrayantes ou qui font penser, mais paraissant dans des revues ou anthologies
ou fanzines, éditées et vendues par des éditeurs… éditeurs dits "de
SF" – même pas forcément… Des éditeurs, pas des mécènes ou sponsors. Je
veux bien suspendre mon incrédulité, pour le plaisir… mais pas quand c'est
sponsorisé par un lobby. Quand on propose une utopie anticipative, faut que ça
tienne le coup.
Et
donc sinon… Foutage de gueule grandeur nature.
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Quant
au voyage dans le futur, il ne pose aucun problème technique et ne coute rien.
Y
a qu'à attendre.
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A LIRE :
L'auteur y
décortique l'histoire du Comité Colbert, ses pompes et ses œuvres… et un peu
toute l'histoire des industries du luxe français au long du XXème siècle.
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Bon. Ça suffit.
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FIRST !
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