Petite suite suédoise… à moins que ce soit un prologue rétrospectif…
Si
mon cerveau et mon disque dur étaient parfaitement rangés, je me serais aperçu
que la matrice de mon article du 21 novembre sur la neutralisation de la langue
était dans un article de 2012 de Slate et de quelques réflexions que j'avais
notées à sa lecture.
Suède.
http://www.slate.fr/story/56183/hen-pronom-neutre-genre-suede
En suédois, "il" se
dit "han", "elle" se dit "hon" et le néologisme
"hen" serait un "on" (asexe ou bisexe) .
# Hen fut
mentionné pour la première fois par des linguistes suédois au milieu des années
1960 puis, en 1994, c'est le linguiste Hans Karlgren qui suggéra son ajout en
tant que nouveau pronom personnel, principalement pour des raisons pratiques.
Karlgren essayait d'éviter l'embarras du il/elle, engluant l'écriture, et
voulait inventer un terme unique pour « nous permettre de parler d'une
personne sans avoir à préciser son sexe ». Selon lui, l'initiative
allait permettre d'améliorer la langue suédoise et de lui conférer davantage de
nuance. #
Je ne sais pas s'il y a un
neutre en suédois, comme le neutre anglais qui désigne les choses… mais aussi
les animaux. Si déjà en français on avait un neutre pour les choses ça ne
serait pas mal : pourquoi un car / une voiture, un bâton / une baguette,
un ballon / une balle, un
référendum / une élection…?
Pour pas mal d'animaux, on se
retrouve forcé de dire que le mâle de la grenouille n'est pas le crapaud mais
la grenouille mâle, que les girafes peuvent être mâles, de même que les antilopes,
les libellules, etc., alors que certains animaux bénéficient de la déclinaison
: un lion, une lionne, un âne, une ânesse, voire de deux dénominations bien
différentes selon le sexe : un cheval une jument, un porc une truie.
Si bien qu'il faudrait aussi,
pour les êtres sexués, animaux et humains, un autre neutre, plutôt transgenre
ou bisexe que a-genre ou a-sexe. Un "on" qui supposerait des
adjectifs à la forme neutre aussi. Car aujourd'hui, quand on emploie
"on", soit comme forme impersonnelle, soit, populairement, comme
remplaçant "nous", on le fait suivre d'un masculin : "on
est nombreux à penser que…", puisque le masculin domine, comme dans
"les hommes et les femmes les plus beaux…". Expression quelque part
aberrante sauf si on pense alors ce masculin comme une sorte de neutre, de la
même manière que l'on dit l'homme" pour désigner l'espèce humaine sans
distinction de sexe ou d'âge.
Rien que sur ce détail du genre
des adjectifs, la réforme s'avère très difficile, tant est ancrée par exemple
la féminisation en e : profond, profonde, grand, grande, généreux, généreuse,
menaçant, menaçante… sans oublier un tas de cas particuliers, comme pour les
animaux : un an / une année, un jour / une journée.
Pourtant il y a des adjectifs déjà neutre ou bi-genres : stable, imposable,
parlementaire, britannique et autres en –ique… etc.
Ce qui se profile là, tant dans
l'article de Slate sur la Suède que dans mon article pour rire du 21 novembre c'est
une réforme tellement profonde de la langue que c'en est une nouvelle langue. Pour
ma part, et comme penser c'est choisir son camp, je suis contre : on a
vraiment autre chose à foutre.
(La fin de l'article de Slate
sur les efforts faits dans les écoles pour dé-genrer ou dé-sexuer les jeux,
jouets, vêtements d'enfant fait froid dans le dos… Winter is coming.)
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