« Drôle de JE. Est-ce la fin du MOI ? »
(Roland Bacri "Le Petit Poète". La Canardothèque, 1957)
Par contre, le risque existe que l'une comme
l'autre (pulsion égoïste ou pulsion solidaire) soient perçues, pensées,
comme extérieures à soi-même.
D'abord, dans telle
situation, il y a les circonstances réellement extérieures, telles que le
froid, la chaleur ou le vent, le terrain, le soleil dans l'œil, les cris
effrayants de l'ennemi… qui vont activer telle ou telle réaction réflexe en provenance
du cerveau reptilien ou des glandes endocrines… provoquant en moi, tant
physiquement que mentalement, un état où je ne me possède plus. (Je pense entre
autres à comment nous pouvons plonger dans la panique face à un incendie de forêt, un mouvement de foule, etc.)
Mais il y a aussi, les « Je
ne suis pas responsable de mes pulsions instinctives, puisque ce sont des
programmes fomentés par mes gènes… ou de mes conditionnements sociaux,
programmes établis par mon éducation. » Toute une démarche de la biologie
génétique actuelle, ou celle des neuro-sciences, après la psychanalyse, en
allant gratter sous la couche de conscience claire et volontaire, nous mènent à
cette déresponsabilisation : « C'est pas moi, c'est mes gènes, mon
cerveau, mes hormones, ma névrose… » Bon prétextes à l'immoralité, à
l'amoralité, à l'irresponsabilité. (Gamins, déjà, on pratiquait ça, après avoir
foutu une baffe à son copain : « C'est
pas moi, c'est ma main. »)
Il faut croire que nous ne
savons plus très bien ce qu'est "moi"… La (très sérieuse) question
que ça pose, en fait, est bien là : qu'est-ce que MOI ? Ou LE MOI. (Et
cette question a par exemple une énorme importance judiciaire, on en entend souvent
parler: le criminel était-il responsable de ses actes au moment des
faits ? Qu'est-ce que la folie, qu'est-ce que la conscience, etc. ?
Et les "circonstances atténuantes" ?)
Et il va bien falloir
comprendre que MOI, "le moi", la personne, l'individu, ce n'est pas
une monade fermée, une chose fixe, bien délimitée, établie un fois pour toutes…
mais plutôt peut-être rien d'autre que la conjonction (complexe, hypercomplexe)
de tout ce bazar : les instincts, les gènes, leur héritage multimillénaire
et leur potentiel programmatique, l'éducation comme héritage culturel et
projet, la problématique infantile, tous les conditionnements ET les
interactions avec la société où je vis et son habitus, ses mœurs, et autres multiples hasards et circonstances
qui ont fondé/fondent sans cesse ce "moi".
L'unité
de la personnalité ? Je doute. Chacun est une foule. Dire JE serait alors pure
prétention, un abus de conscience.
"Mon nom est Gérard Onymo."
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