On
était là, tranquilles, à envoyer nos vœux, à en recevoir, à remercier, et poutous
à tous… Et puis maintenant, dévastés, en vrac, on pleure, on bouillonne de rage
impuissante
Bien
sûr, un attentat quelconque, on s'y attendait, mais… je sais pas… sur un marché
de Noël avec explosion de crèche, ou à la Tour Eiffel avec explosion de touristes,
une gare, ou n'importe quel bâtiment officiel… A la limite Disneyland avec gros
Mickeys piégés et attaque de drones kamikazes sur le château de la Belle au
Bois Dormant…
Mais…
Charlie Hebdo !
Ça
semble tellement dérisoire… eux qui étaient les chantres de la dérision. Et
puis, qu'on les connaisse personnellement ou non, c'étaient nos copains –
et depuis des dizaines d'années. Faisant depuis quelques années, en particulier
ici, le même métier, et sachant que je ne l'aurais pas fait ou n'aurais pas su
comment le faire sans eux, sans leur exemple, je dis "on", je dis
"nous", pour parler d'eux. Et donc, bien sûr, je clame, nous clamons « Je
suis Charlie ! » comme les gladiateurs révoltés de Spartacus,
vaincus, prisonniers, lançaient tous aux maitres romains « Je suis
Spartacus ! »
Charlie
est grand et nous sommes son prophète. Il est ici, partout, maintenant, en
chacun de nous. (Je vais éviter quand même de dire "Je suis partout"…
il y a un précédent nauséabond, dans la presse…) Tous ces petits personnages,
tous ces "anonymes", comme on dit, grouillant autour de la République
et sur la feuille de papier, ils sont Charlie… (Le seul défaut, c'est que ces
petits carrés noirs, ça revient cher en cartouches – je parle des cartouches
d'imprimante. Mais nous arborerons bientôt une "carte blanche" :
« Je LIS Charlie Hebdo. »)
C'est
un grand NOUS qui s'est déclaré, là.
On
dit que c'est notre "11 septembre". Oui… et on peut être frappé par
la différence des symboles, des clichés identificateurs : les USA, c'était
le WTC, Centre du Commerce Mondial… la France, ce qui nous définit, c'est
Charlie Hebdo ! Incredible !
Si
nous représentons (symbole) quelque chose de la France, ou de la République, ce
n'est certainement pas pour abreuver nos sillons d'un sang impur. On n'est pas
"morts au champ d'honneur", on veut pas la légion d'honneur (Tardi
l'a refusée, merci à lui…), on veut pas de funérailles nationales ni finir au
Panthéon (Camus n'y est pas, merci à lui…) On veut pas devenir immortels. On
préfère mourir de notre belle mort. On veut un cercueil en carton biodégradable
et une tombe dans un cimetière tranquille de campagne. Ou alors la fosse
commune des communards.
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