dimanche 11 décembre 2011

Mané, thécel, pharès


LO N°465. 11 décembre 2011
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JOURNAUX
Zélium N°7, canard démarré mensuel, après une interruption économique de quelques mois, revient à rythme "irrégulomadaire". (Et j'y continue en dessins.)
Supposons le problème résolu
La question de la surpopulation mondaine étant un de mes dadas, je me permets de reprendre ici in extenso cet article.
# LA BOMBE B, COMME BÉBÉ
Depuis le 31 octobre, on est sept milliards sur la planète. Bienvenue au septmilliardième. Bienvenue… ou malvenue.
Devant cette marée humaine, la presse affiche pour la première fois une pointe  d’inquiétude et un soupçon de désarroi. Un ton nouveau qui étonne, tant les médias ont coutume de « dédramatiser » les enjeux de la natalité.
Et pas seulement en France, un pays champion en termes de préoccupations et de politiques natalistes, où les médias se montrent plutôt probébé.
Jusque là, l’opinion commune était : changeons le mode de répartition des richesses et tout ira bien. La question du nombre se résumerait à un « simple » problème de partage des ressources, puisque 20 % des habitants de la planète consomment 80 % de ses richesses. Poursuivons le raisonnement. Si on va par là, la guerre n’est pas un problème non plus. On entend ici et là des bruits de bottes ? Il suffit de régler les antagonismes ethniques, religieux et territoriaux – bref, de faire la paix dans le monde – et voilà le dossier  "guerre" instantanément clos. Et hop, la baguette magique de Harry Potter n’aurait pas fait mieux. Qu’on ne s'y trompe pas, je ne suis pas une militante de la décroissance. D’abord j’ai deux gosses, donc je trouve malhonnête de dire aux autres : « Ne faites pas comme moi ».
Mais je juge également faux cul de s’abriter derrière le paravent de l’idéalisme (« rien n’est plus beau qu’un sourire d’enfant ») pour justifier mes choix, discutables sur le plan collectif.
En fait, je suis une Indignée du bourrage de crâne et du pathos. Qu’on cesse de nous vendre l’enfantbonheurquiestnotreavenir : la grande baby’llusion, ça suffit. #
CORINNE MAIER Zélium 7
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Quant à Barricade, le N°2 est en kiosque. J'y suis aussi et il est beaucoup mieux que le N°1. Avec deux fois plus de dessins d'humour actualitaire, ça commence à ressembler à un journal d'humour et d'humeurs.
— Et d'idées ?
— Pas encore lu… J'ai juste regardé les zimages.
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Psikopat N° 237 présente un dossier "Impérialisme américain", où l'on voit que l'impérialisme américain, c'est plus ce que c'était. J'y suis aussi. Les uns et les autres dessinateurs, on s'est plus défoncés sur le thème MacDo-Coca que sur le thème char d'assaut-CIA-bombe…
Le prochain sera sur le thème "chirurgie esthétique". PIP !
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Un peu de littérature ancienne :
« TIMEO DANAOS ET DONA FERENTES »
D'après Virgile, en voyant le cheval de bois géant laissé par les Grecs aux abords de Troie, le grand prêtre Laocoon dit « Timeo Danaos et dona ferentes » (je crains les grecs y compris quand ils font des cadeaux) et ne fut pas écouté. On connaît la suite.
— Et maintenant tout est à l'envers. On pourrait dire « Timeo Germanos et dona ferentes » !
— Les Grecs, on leur fait pas de cadeaux !
— Même à Noël ?
— Surtout à Noël.
— Par contre on peut s'offrir un Grec. On les brade, cette année.
— Eux et les zaudres zeurobéens du zud, zigales bas zérieuses. Ach !
— Mais l'Allemagne doit sa prospérité à ses exportations, nous répète-t-on (teuton) evryday…
— Oui.
— Et qui dit "pays exportateur" dit : "autres pays importateurs" = clients. Et où ils sont, ceux-ci ? En Europe, entre autres… du sud, entre autres… en Grèce, entre autres… Donc si les manœuvres économiques de l'Allemagne exportateuse tuent ses clients, elle va se retrouver aussi dans la merkozy jusqu'au cou.
— C'est peut-être pour ça que dores et déjà elle rentre la tête dans les épaules, la Merkel, courbant l'échine sous la menace de l'épée de Damoclès tenue par les agences de mutation.
— Entre Angela Merkel et Eva Joly, que choisir ?
— Angelina Jolie !
— ……… C'était la minute germanophobe très à la mode. Manque plus que dire « les Allemands sont des nazis ».
— C'est de la généralisation hâtive. Les Allemands ne sont pas tous des nazis. J'ai même d'excellents amis allemands. Et ils sont loin d'être heureux de la vie qu'on leur fait mener. Bon, évitons de dire "les Allemands", disons "l'Allemagne", ou "l'État allemand", ou "le gouvernement allemand", plutôt que "les Allemands".
— Toi, tu te gènes pas pour dire "les Chinois", d'habitude.
— Les Chinois c'est pas pareil. Les Chinois sont tous des… euh… des Chinois.
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Suite du cours de littérature ancienne :
« MANE, THECEL, PHARES »*, a écrit la main invisible du marché sur le mur du parlement grec. Tu as été « compté, pesé, divisé »…
Référence biblique dans le livre de Daniel : Balthazar, le dernier roi de Babylone, assiégé par Cyrus dans sa capitale, se livrait à une orgie avec ses courtisans ; par provocation impie, il fit servir sur les tables les vases sacrés que Nabuchodonosor avait autrefois pillés au temple de Jérusalem. Cette profanation à peine commise, le monarque vit avec épouvante une main qui traçait sur la muraille, en traits de flamme, ces mots mystérieux : Mane, Thecel, Phares, que le prophète Daniel, consulté, interpréta ainsi : Tes jours sont comptés ; tu as été trouvé trop léger dans la balance ; ton royaume sera partagé.
Dans la même nuit, en effet, la ville fut prise, Balthazar fut mis à mort, et la Babylonie fut partagée entre les Perses et les Mèdes.
Mède, alors.
Bref, l'exécution d'un plan de sauvetage… c'est quand même une exécution !
(* Autant que je sache, on prononce "Mané, técel, farès")


Dessin paru dans La Revue N°18. Pas du tout au sujet de la Grèce mais sur les termes employés à contresens. Mais c'était tentant…
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Restons encore un peu dans les textes bibliques avec la parabole des talents (un talent était une très grosse somme) :
« C’est comme un homme qui, partant en voyage, appela ses serviteurs et leur remit sa fortune. 
A l’un il donna cinq talents, deux à un autre, un seul à un troisième, à chacun selon ses capacités, et puis il partit. Aussitôt celui qui avait reçu les cinq talents alla les faire produire et en gagna cinq autres. De même celui qui en avait reçu deux en gagna deux autres. Mais celui qui n’en avait reçu qu’un s’en alla faire un trou en terre et enfouit l’argent de son maître. Après un long temps, le maître revient et il règle ses comptes avec eux. Celui qui avait reçu les cinq talents s’avança et présenta cinq autres talents : « Seigneur, dit-il, tu m’a remis cinq talents : voici cinq autres talents que j’ai gagnés.
— C’est bien, serviteur bon et fidèle, lui dit son maître, en peu de choses tu as été fidèle, sur beaucoup je t’établirai ; entre dans la joie de ton seigneur ». 

Vint ensuite celui qui avait reçu deux talents :
« Seigneur, dit-il, tu m’as remis deux talents : voici deux autres talents que j’ai gagnés. »
— C’est bien, serviteur bon et fidèle, lui dit son maître, en peu de choses tu as été fidèle, sur beaucoup je t’établirai ; entre dans la joie de ton seigneur ».
(Ben oui, les fables, il y a toujours un côté répétitif, comme dans les contes pour enfants…)
Vint enfin celui qui détenait un seul talent :
« Seigneur, dit-il, j’ai appris à te connaître pour un homme âpre au gain : tu moissonnes où tu n’as point semé, et tu ramasses où tu n’as rien répandu.  Aussi, pris de peur, je suis allé enfouir ton talent dans la terre : le voici, tu as ton bien. » 

Mais son maître lui répondit : « Serviteur mauvais et paresseux ! tu savais que je moissonne où je n’ai pas semé, et que je ramasse où je n’ai rien répandu ? 
Eh bien ! tu aurais dû placer mon argent chez les banquiers, et à mon retour j’aurais recouvré mon bien avec un intérêt. Enlevez-lui donc son talent et donnez-le à celui qui a les dix talents. Car à tout homme qui a, l’on donnera et il aura du surplus ; mais à celui qui n’a pas, on enlèvera ce qu’il a. Et ce propre à rien de serviteur, jetez-le dehors, dans les ténèbres : là seront les pleurs et les grincements de dents. » Evangile de Mathieu 25,14-30 (Bible de Jérusalem)

Récolter où l'on n'a pas semé, ramasser où l'on n'a rien répandu… autrement dit placer en banque, spéculer… Sans pousser bien loin l'exégèse, on a là une bonne description du capitalisme financier, auquel le troisième serviteur n'a rien compris. Il est bien puni, maintenant.

Un sPQlateur, c'est quelqu'un qui transforme le papier-monnaie en papier-cul…