LO N°345 (26/12/09)
RIEN N'A PLUS D'IMPORTANCE
Selon comment vous prononcez "plus", ça peut vouloir dire "c'est foutu, alors plus la peine de…" ou "c'est la chose la plus importante du monde et de tous les temps" — comme vous voulez.
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(N'importe quoi en noir sur rouge, ça fout la trouille, non ?)
RÉSOLUTIONS POUR L'ANNÉE NOUVELLE
"Baisser nos émissions de gaz à effet de serre de 20% ou plus d'ici 2020". C'est bien, mais comment on fait ? Parce que dit comme ça, c'est un peu abstrait… et les déclarations de Copenhague se sont contentées de cette abstraction. Du discours, quoi (comme d'hab').
Comment on fait ? En vrai.
Pour faire image, je vais dire 25% (un quart), et "en dix ans"… Et je ne vais pas considérer "à partir de chiffres de 1990", c'est déjà loin. Mais de maintenant.
Pouvez-vous vous faire à l'idée de réduire d'un quart, dans les dix ans qui viennent…?
- Vos déplacements automobiles. En fréquence et/ou en distance. (Possible. Sauf pour quelques accros. Et ne me parlez pas de voiture électrique ou d'agro-carburants !)
- Vos trajets en avion. (Possible aussi. Sauf pour quelques accros. Et pareil pour l'agro-kérozène !)
- Vos emballages. (Marché, sacs en papier, vrac…)
- Votre consommation de viande de bœuf. (Deux steaks de moins par semaine, par exemple.)
- Votre consommation de fruits exotiques et/ou hors saison. (Se passer de bananes jusqu'à ce que le réchauffement climatique permette que ça pousse chez nous…)
- Votre chauffage en hiver. (Aïe, vivre à 15°…? Chez moi, j'ai 16 – ça va.)
- Votre clim' en été. (Je n'en ai pas je n'en ai jamais eu…)
- Votre temps de connexion/téléchargement sur Internet. (Hum…)
- Votre temps de radio, télévision, éclairage, etc. (Simple question de vigilance dans les gestes quotidiens…)
Mais aussi votre fréquence de déplacements en transports en commun, votre chauffage au bois, vos lectures en papier… parce que tout ça aussi, ça produit du gaz à effet de serre et, quand il y a urgence, il ne suffit pas de s'attaquer au pire, il faut lutter partout !
Pour ne pas se perdre dans les détails, et puisque l'argent sert de jauge ou de résumé de tout le reste, on peut aussi se représenter ça en se plaçant sur un plan financier : êtes-vous prêt à réduire vos revenus d'un quart ? (Et par là même réduire d'un quart votre consommation de tout, puisque tout coûte de l'argent, tout réclame de l'énergie, et donc produit des gaz à effet de serre, donc du réchauffement.) On peut appeler ça "appauvrissement" ou "décroissance", ou "sobriété volontaire"… On pourrait d'ailleurs envisager que cette taxe de 20% sur tout soit reversée aux habitants des pays pauvres, etc.
Tout ça, ça semble possible, non ?
Il y aurait autre chose, pour faire image : se rappeler que la vie (animale), la respiration, produit du CO2. Pouvons-nous envisager de respirer un quart de moins ? Ce qui veut dire, en fait, vivre un quart de moins (on en est à ± 80 ans d'espérance de vie, donc euthanasie à 60 ? – merde, je suis mort !), ou alors faire un quart de moins d'enfants, ce qui est plus raisonnable… Ou une manipulation génétique qui ferait des gens un quart plus petits. Mais ça, c'est l'avenir… Dans les dix ans à venir, dans l'immédiat, est-il pensable d'éliminer un quart de la population mondiale ? (Je veux dire en plus des morts normales). Bien sûr qu'on ne peut pas envisager froidement ce genre de "décroissance". Mais "la nature" (qui n'est pas hostile mais implacable, y compris "la nature humaine") risque de s'en charger sans se préoccuper de confort moral. (Pandémies, guerres, tsunamis, guerres, typhons, siphons, guerres, noyages en masse, guerres, incendies, guerres…)
Mais, mine de rien, de plus en plus de gens (scientifiques, médiatiques, politiques) évoquent (prudemment) l'idée de contrôle actif des naissances, malgré le fort tabou… Disons-nous bien que le laisser-faire démographique est un crime contre l'humanité.
Maintenant, pour revenir au CO2, 50% ou plus d'ici 2050, c'est une autre paire d'atomes d'oxygène ! Et ça suppose bien autre chose qu'un ajustement de notre mode de vie : un véritable retournement.
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QUESTION DE NOMBRE
Le plus gros émetteur de gaz à effet de serre, quel que soit le pays, c'est le PIB. Augmentation du PIB = augmentation des dépenses d'énergie = augmentation des émissions carbone.
Les moyennes sont une chose, les totaux en sont une autre (tautologie nécessaire).
Un Chinois émet, en moyenne, cinq fois moins de gaz à effet de serre par an qu'un Américain.
Pourtant la Chine est devenue, en 2006, le premier pollueur mondial, devant les Etats-Unis.
Pourtant 10% des ménages chinois sont équipés de chauffe-eau solaire, un nombre en hausse de 20% par an.
Pourtant la Chine est devenue, en 2006, le premier pollueur mondial, devant les Etats-Unis.
La Chine est le premier producteur mondial de panneaux photovoltaïques.
Pourtant la Chine est devenue, en 2006, le premier pollueur mondial, devant les Etats-Unis.
Pékin veut atteindre 15 % d'énergies non-fossiles d'ici à 2020, selon les objectifs fixés dans son plan national sur le changement climatique.
Pourtant la Chine est devenue, en 2006, le premier pollueur mondial, devant les Etats-Unis
— question de nombre.
(Sans oublier que la majeure partie des entreprises industrielles chinoises travaillent pour NOUS. Autrement dit, leur pollution est notre pollution. Quant aux panneaux photovoltaïques qu'ils produisent, ce sont les moins chers du monde : nous les leur achetons donc, ce qui 1) ne fait pas vivre des entreprises françaises susceptibles d'en produire, 2) coûte un max en énergie pétrolière pour le transport depuis la Chine, et donc en gaz à effet de serre, et donc en réchauffement climatique.)
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Cao Tian Ba, "village écologique modèle" dans le Yunnan Kunming (Chine)
Dans les zones rurales, le gouvernement chinois lie le combat contre la pauvreté à l'essor des énergies renouvelables
Il y a quelques mois encore, Cao Tian Ba était un village anonyme de la province chinoise méridionale du Yunnan. C'est aujourd'hui un village écologique modèle. Cette mutation – signalée par une grande stèle dressée dans la rue principale – a changé le quotidien de ses 140 habitants, des montagnards de la minorité des Miaos.
La panoplie complète des énergies renouvelables est arrivée presque du jour au lendemain : chauffe-eau solaire, équipement de la cuisine au biogaz et une dizaine de lampadaires photovoltaïques pour l'éclairage public. Sur les murs de terre ocre rouge des grandes fermes serrées les unes contre les autres, des dessins expliquent comment fonctionnent ces nouvelles sources d'énergie. Au moins une personne par famille a reçu une formation.
« Je n'utilise plus l'électricité que pour faire marcher mon poste de télévision », explique Pan Jun Rong, 40 ans, chef du village et secrétaire local du Parti communiste qui a convaincu les familles de verser 1 000 yuans chacune (100 euros environ) à ce tribut écologique. Une somme non négligeable pour ces paysans qui gagnent quelques milliers de yuans par an. Le reste a été subventionné par la province.
Dans une cuisine carrelée de céramique blanche, Wang Qin vante devant un réchaud neuf ses nouvelles installations : « C'est très pratique, je n'ai plus besoin d'aller dans la montagne pour ramasser le bois », raconte la jeune paysanne. Elle et son mari possèdent six cochons et un hectare de terre sur lequel ils font pousser du maïs, des poivrons et du tabac. « Avant, je dépensais 40 à 50 yuans par mois pour l'électricité, aujourd'hui c'est deux fois moins », ajoute-t-elle
Le biogaz est fourni gratuitement aux villageois. Il provient de l'exploitation porcine située à un kilomètre du village. La ferme privée qui élève 20 000 animaux s'est équipée d'une unité de récupération du lisier qui permet, après fermentation, de produire 250 m3 de gaz par jour. De quoi approvisionner la ferme et le village.
(…) Dans ces régions rurales déshéritées, le gouvernement ne vise pas seulement à déployer des énergies renouvelables pour freiner les émissions de gaz à effet de serre responsables du réchauffement climatique. Il cherche aussi à améliorer les conditions de vie des paysans restés à l'écart de la croissance fulgurante enregistrée par le pays au cours de ces dernières décennies.
Ici, le recours au biogaz aide aussi à freiner la déforestation sur les versants montagneux de moyenne altitude. « La présence des arbres permet de réduire l'érosion des sols et des glissements de terrain », insiste le chef du village qui mesure le prix de cette préservation : Cao Tian Ba est un village de paysans déportés. En 1989, tous vivaient à 80 km d'ici mais furent obligés de partir pour se mettre à l'abri des catastrophes naturelles liées notamment à la déforestation.
Ciao Tian Ba qui est le premier village du district à avoir été équipé de biogaz collectif doit faire des émules. Des projets d'élevage porcin sont à l'étude à proximité d'autres villages. Il existe aussi des programmes pour équiper individuellement les familles. La production de gaz se fait alors à partir de la récupération des excréments humains et du lisier des quelques porcs que possèdent la plupart des villageois. Une subvention de 1 000 yuans par famille est accordée pour l'achat d'un biodigesteur qui vaut en moyenne le double.
Le gouvernement s'est fixé pour objectif national l'équipement de 50 millions de foyers ruraux d'ici à 2010. La moitié a été atteinte en 2007.
Les agences d'aides multilatérales soutiennent ce projet. La France y participe à travers l'Agence française de développement qui finance l'équipement de 27 000 familles dans le Yunnan et de 100 000 dans le Sichuan.
Laurence Caramel © Le Monde
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Ne crions quand même pas au miracle : ce "biogaz", c'est quoi ?
Un gaz combustible, un mélange en moyenne de méthane (CH4) à 65% et de
CO2 à 35%. C'est une énergie renouvelable issue de la biomasse (lisier, fumier, déchets ménagers, déchets de culture...)
Principalement du méthane CH4, donc, gaz à effet de serre vingt fois plus virulent que le CO2. Il absorbe une partie du rayonnement infrarouge émis par la Terre, et l'empêche ainsi de s'échapper vers l'espace. De plus il contribue aussi indirectement à l'effet de serre en diminuant la capacité de l'atmosphère à oxyder d'autres gaz à effet de serre (comme les fréons).
Mais si on le brûle ?
Son utilisation comme combustible émet du CO2 et de la vapeur d’eau (qui est aussi un gaz à effet de serre important.)
Au total, quand même, comme les cochons* produisent de toute façon du méthane, autant le brûler : ça produit de l'énergie et c'est moins pire que de le laisser s'échapper dans l'atmosphère. On reste donc au niveau des ajustements. Que l'on peut voir comme du pipo ou comme une démarche de transition…
(* Je cite les cochons parce qu'il est question de lisiers, mais n'oublions pas les vaches qui rotent, les hommes qui pètent, les mangroves qui pourrissent, les cimetières… Et les clathrates. Tout ça c'est du méthane beaucoup plus difficile à récupérer pour l'éclairage ou la chaudière…)
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