jeudi 19 février 2009

VENDREDI 13 OU ST VALENTIN ?

LO N° 280 (18/02/09)

L'ARGENT-DETTE # 12

PAUVRES ?
Déjà depuis un moment, on ne parlait plus de pauvres, on disait : "(les Français - ou - les catégories) les plus défavorisés", ou "les plus modestes". Maintenant, mieux : "la partie inférieure de la classe moyenne."

(100.000 SDF)

FAUT-IL RELANCER LA CONSOMMATION ?
Bien sûr que non. Il faut tout faire pour faire baisser la consommation.

« Consommer = acheter des choses dont on n'a pas besoin avec l'argent qu'on n'a pas. » (Christophe Alévèque. Siné Hebdo # 24)

PIÈGE
Les Français sont-ils plus conscients et/ou plus raisonnables et/ou plus rapides à comprendre que leurs banquiers et leurs chefs d'État ? Parce qu'il paraît, d'après un chef banquier, que c'est bon, les banques, perfusées par l'État, sont prêtes à prêter plein de sous… mais que c'est la demande qui manque. Les Français hésiteraient à emprunter — pour achat immobilier, principalement, et automobile.

DÉTEMPORALISATION
Comme on parle de délocalisation pour la fuite des entreprises à l'étranger, on pourrait parler de détemporalisation pour la dette. La dette est une fuite de l'argent vers le futur, autrement dit l'évacuation du problème "en avoir ou pas" vers un ailleurs temporel indécis.

S'il n'existe pas d'argent (que de la dette), il n'y a pas d'argent "détruit" ou "perdu", dans la crise, seulement de la dette annulée.
Faire de nouvelles dettes est la chose la plus facile du monde : nos gouvernements s'y emploient joyeusement à coups de plans de relance(s) (de godasses ?). L'endettement des États en croît d'autant ? Quelle importance ? Cet argent (fictif) n'est pas "l'argent du contribuable", comme on nous le blatère sans cesse. Cet argent n'existe pas : c'est de la dette, il ne peut donc pas se perdre. L'État ne pourra jamais le rembourser ? Mais à qui le rembourserait-il ? Et pourquoi ? Nous "laissons à nos enfants", comme on dit, une dette énorme (c'est-à-dire, en fait, plein de fric) qu'ils ne pourront jamais rembourser, qui se détruira dans une future crise, ou qu'ils "rembourseront" en continuant à "emprunter", c'est-à-dire à créer de l'argent-dette. Et ce ad infinitum.
Alors où est le problème ? *
(Et puis, entre nous, "nos enfants" auront bien d'autres soucis que des hypothèques et des intérêts : carence d'énergie, carence de matières premières, famines, soifs, fonte des pôles, montées des eaux (hélas salées), réfugiés climatiques, tornades, guerre du pétrole, de l'eau, de l'espace peuplable… surpopulation, surpollution………)
(* Le problème est dans le terme : "ad infinitum".)

DÉMISSION, RÉCESSION, DÉPRESSION
Le ministre des finances japonais donne sa démission. Pas étonnant. Et ce n'est pas seulement la question de son état d'anti-dopage inopiné face aux caméras de la télé lors du G 7 (en bref, bourré, il roupillait grave puis bafouillait). En fait, la question est : Pourquoi TOUS les ministres des finances de TOUS les pays ne donnent-ils pas leur démission ?
Qu'ils avouent donc tous, et avec eux les déconomistes,
- leur incompréhension
- leur incompétence
- leur impuissance.
Ils ne savent pas quoi faire pour surmonter "la crise" ? Mais c'est que personne ne sait quoi faire. Et personne n'est capable de nous dire comment s'en tirer, ou simplement comment gérer ça. Même le pharmacien (ou la pharmacy spam en ligne) et ses happy pills… Pas d'espoir et personne pour en donner, à part quelques philosophes vite qualifiés d'utopistes.
Il n'y a pas de messie, pas de sauveur, ni sar ni kozy, ni baraco ni bama…
Il n'y a que des pompiers qui tentent de pomper dans la cave inondée l'eau pour éteindre l'incendie du grenier. (Je suis assez content de mon image, moi…)
Il y a quelques plombiers (polonais ?) qui tentent de colmater les fuites, quelques vitriers qui remplacent quelques vitres, ou quelques couvreurs qui remettent quelques tuiles envolées. À moins que ce ne soient les plombiers qui se chargent des vitres, les vitriers des tuiles et les couvreurs des vitres… ce qui n'a rien d'invraisemblable.
… Et pas mal de sémanticiens qui essaient en vain d'éviter les mots qui fâchent, ou de les traduire en langage courant (c'est-à-dire en langage)… ou d'en changer le sens.
« Ceci n'est pas une récession » — et ma sœur n'est pas masseuse.

En fait, non, ce n'est pas une récession (conjoncturelle), c'est une dépression (structurelle), ce qui est beaucoup plus grave, plus long, voire définitif : ça ne guérit pas. « On ne guérit pas du mirage croissanciste à coup de récession. » (Paul Aries).
"Conjoncturel", ça voudrait dire que ça ne va pas durer. Face à (par exemple) une dégringolade boursière, les zéconos adorent dire que c'est conjoncturel. "Structurel", par contre, ça signifie que "ça ne va pas s'arranger". Ex : la crise financière, économique, sociale, et tout ce que vous voudrez — et la crise climatique y afférant. (Dans quel ordre s'emboîtent ces poupées russes ? Laquelle est la grosse qui les contient toutes ?). C'est pour longtemps, c'est pour toujours.
La récession, c'est juste un arrêt momentané, comme une grippe. Ou ça sert de purge. On se soigne et c'est reparti pour un tour. On n'a rien appris. (Ça, ça reste à voir… Les maladies sont faites pour nous guérir… mais ça ne marche pas à tous les coups, c'est vrai.)

MOUVEMENT PERPÉTUEL ?
Mais ça repart pire : en vélo, si on s'arrête de rouler, on tombe. Le capitalisme de croissance, s'il arrête de pédaler (dans la smoule ?) choit, tombe, s'effondre.
Ailleurs, avant, les sociétés traditionnelles ou "primitives" (non croissantes) se contentaient de renouveler cycliquement le capital initial. On pourrait appeler ça une stabilité ondulante : équilibre perdu / récupéré / reperdu / re-récupéré, etc, un renouvellement cyclique (quasi) à l'identique, un recyclage. À court, moyen ou long terme, on retombe sur ses pieds.
Tandis que la société capitaliste (d'origine monothéiste judéo-chrétienne) est téléologique, c'est-à-dire qu'elle ne fonctionne pas par cycle, qu'elle refuse la stabilité (considérée comme stagnation) : elle va de l'avant, toujours de l'avant, dans un élan infini vers l'avenir lui-même infini, le nez dans le guidon, dans une fabrication incessante d'avenir. (Ad infinitum)

"Toujours plus, toujours plus loin, toujours mieux !" — Fantasme infantile de mouvement perpétuel.

Mais pendant ce temps, la Terre est finie (je veux dire entièrement occupée par l'homme) : il n'y a plus de "toujours plus loin"… ses ressources s'épuisent : il n'y a plus de "toujours plus"… partant, il n'y a plus de "toujours mieux" possible. (En tout cas tel que notre société entend le mot "mieux").

(Il est à noter que le Shark est le premier président élu dans ce monde nouveau — c'est con pour lui.)

Ce problème systémique structurel, — historique et planétaire, absolument inédit — le citoyen lambda ("on") ne sait sans doute pas le définir et l'exprimer, mais il le sent — malaise, soucis, angoisse du futur — et son moral continue à baisser, et sa confiance en les responsables continue de s'effondrer. Toujours confusément, "on" sent bien que les responsables (ceux qui sont censés donner des réponses) n'y peuvent rien, sont, autant que "on", dépassés par les évènements… d'où supplément de non espoir et transformation des responsables positifs (ou censés positifs) en responsables négatifs — bientôt boucs émissaires.

LES FRANCAIS
Les Français seraient rêveurs et immobilistes, paraît-il ? Mais c'est juste qu'on sait que demain ne sera pas comme aujourd'hui, alors on freine des quatre fers tout en attendant un changement. Mais quel changement ? Un miracle ?
On veut que ça change, oui… ou on veut bien que ça change, mais comment, dans quel sens ? On voudrait savoir, pour pouvoir peut-être avoir le temps de s'adapter. Mais voilà, on se retrouve aussi perdus que les dirigeants, à piloter à vue et à prendre sur le coin de la figure des changements dont on ne perçoit pas la finalité (là je parle en particulier des actions-agitations du Shark), changements pour le changement, bruit, tours de manège et agitation du rat dans sa cage. On nous demande des efforts. Nous demandons une nouvelle manière de politiquer. On est prêt à négocier. L'action, oui, mais pas sans la transaction. Et en fait on voit plus de transe que d'action (réelle).

Entrer dans la réalité, dissiper le leurre, l'illusion : on voudrait que les politiques arrêtent avec « On colmate les brèches de la coque et ça va repartir comme un seul homme dans la même direction ! » : on n'y croit plus. Pas non plus « Sauve qui peut nous coulons, tous aux canots, mais merde y a pas de canots ». Mais qu'ils osent dire : « La croissance est derrière, elle ne reviendra pas, ni l'an prochain, ni en 2012, le développement, c'est fini ! » Et puis « Il y a un nouveau modèle de société à monter ! »… et c'est peut-être bien ça qui nous redonnerait la pêche !

Est-ce que ça va péter ? Sans doute pas, car on a conscience qu'il faut que ça change, d'accord, mais le grand soir, ça fout la trouille. Et la trouille, ça fait peur.

Alors on reste dans une ébullition cahotante et chaotique, on reste dans le conjoncturel, on frémit à chaque cahot de la route, à chaque virage trop sec, on débat dans des hauts et des bas.

ON PERD ÉNORMÉMENT DE TEMPS !

(Cela dit, en mai 67, il y a eu de graves émeutes à la Guadeloupe… et, un an après………)

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