• Relativité du
relativisme.
L'idée dominante du
billet, déjà esquissée dans les billets précédents : est-ce que ça vaut le
coup de se bagarrer pour raviver ces termes facilement considérés comme usés ou
trop idéaux ?
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« Pour que des
individus à l'intérieur d'une société et des peuples vivent ensemble le plus
harmonieusement possible, il faut bien qu'ils respectent un certain nombre de
valeurs, qui ne sont pas forcément transcendantales et universelles et peuvent
être relatives. » (Jean-Claude
Carrière)
(Dessin
paru dans Siné Hebdo N°75)
Ces
mots-valeurs ou notions-valeurs de liberté,
égalité, fraternité, sous forme de devise ou de slogan, se veulent transcendantaux et
universels, oui. Sacrés, même. (« Les
droits naturels, inaliénables et sacrés… sous les auspices de l’Être
Suprême », dit la Déclaration
de 1789. "Naturels" ? "Inaliénables" ?
"Sacrés" ?!…) Les Valeurs (ces fameuses Valeurs) sont de
l'ordre du discours lyrique, de l'universalisme rhétorique et héroïque,
emphatique (romantique, même), avec quelque chose de bien-pensant, idéaliste,
angélique. Dans la Déclaration, elles sont a
priori posées comme des Absolus.
("Liberté, Égalité, Fraternité" auraient-elles remplacé "Foi, Espérance,
Charité", vertus théologales du christianisme ?) Seulement, les
Absolus, comme le Bon Dieu, on n'y croit plus. Relativisons donc, tout en
sachant que le relativisme mène au communautarisme (dans le sens de sectaire)
ou au "n'importe quoi du moment que c'est mon choix – ou ton
choix – ou son choix" (anomie).
À
cette idée de nécessité de valeurs relatives,
j'ajouterai : valeurs autant que possible concrètes. Nous avons besoin d'un consentement au monde, à la
réalité, plutôt que de nous cogner la tête dans les étoiles des Idées-idoles.
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• Liberté (retour sur
la –)
La
Liberté
est avant tout une question individuelle, disent les philosophes. Mais ils ont
tendance à se situer soit du côté de supposées Valeurs Universelles, soit dans
un espace assez abstrait, platonicien,
où planent des Absolus… Je laisse
donc de côté la Liberté sartrienne, notion
proprement inconcevable, sorte de vertige métaphysique qui donne la nausée,
pour rester dans le quotidien, le concret, social, politique : la réalité.
Dans
la réalité (la vie quotidienne, le social), la liberté de chacun n'est pas cet absolu dont nous sommes épris (sans
le comprendre – parce qu'il est proprement incompréhensible), elle est limitée
ou délimitée par les contraintes physiques (en gros, "les lois de la
nature") et, sur le plan social, par la liberté des autres… et donc, par l'égalité, par la justice…
et du coup, inévitablement, comme déjà dit, encadrée par les lois.
Liberté
relative, donc, relative aux conditions naturelles et sociales (= la réalité).
• Mot-clé :
responsabilité.
Dès
les débuts du concept (au siècle des Lumières) on l'a lié à la responsabilité.
Pas de liberté sans responsabilité. Pas de responsabilité sans liberté. C'est
(ça devrait être) au plus profond de l'idée que l'homme se fait de soi.
Christiane Taubira, dans un bel échange avec le philosophe Frédéric Gros
(Philosophie magazine N°75, décembre 2013 - janvier 2014) cite Franz
Fanon : « Il ne faut pas
chercher à fixer l'homme, parce que son destin est d'être lâché. »
Partant, le sens de sa vie, dit-elle, était à conquérir au delà des
déterminismes. « Chaque homme étant
"lâché", il est pleinement responsable de ses actes. C'est
précisément parce que nous sommes libres que nous avons à répondre des actes
que nous commettons, sans pouvoir nous défausser de nos responsabilités sur
quiconque. […] Avec la fin de l'absolutisme monarchique, chacun a été reconnu comme un sujet
de droit autonome, ce qui présente à la fois des avantages et des
inconvénients. Du côté des avantages, l'individualisme moderne nous affranchit
des appartenances familiales, communautaires, confessionnelles. En
contrepartie, le citoyen doit assumer pleinement les conséquences de ses actes,
notamment en cas de crime ou de délit. » (Mais je n'en finirais pas de
développer autour du principe liberté/responsabilité, de l'éthique de la
responsabilité, de l'impératif de responsabilité…)
Ce
"sujet de droit autonome" nous amènera donc à nouveau à l'égalité.
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(À
suivre)
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