samedi 9 avril 2016

Racines

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Notre société française, c'est un fait historique, est d'origine chrétienne (les fameuses "racines chrétiennes" qui font les Français "de souche" taillés dans le vrai bois de la vraie croix). L'histoire récente (= la réalité présente) fait qu'elle doit faire de la place pour une religion autre – l'islam. L'admettre, la tolérer ou mieux, l'intégrer. (Dans ce "doit", il y a quelque chose comme "qu'elle le veuille ou non", because "fait accompli", et une balance pas facile entre l'accueil enthousiaste et la résignation…)
Et ce à un moment (historique) où cette fameuse "origine chrétienne", on (de nombreux Français) croyait bien s'en être débarrassé, sinon l'avoir oubliée, du moins l'avoir mise au rencart en tant qu'archaïsme depuis les fameuses Lumières, la Révolution, la loi de Laïcité. Notre société française moderne se veut définie comme laïque, dans le sens de "athée sur racines chrétiennes".
En bref, le religieux, on s'en fout… (pas tout le monde, certes, mais ceux que je mets dans ce "on" se reconnaitront)…
… ou on s'en foutait jusqu'à ce que l'islam vienne mettre les pieds dans le plat de la laïcité. Simultanément, le reliquat chrétien de notre société s'est réveillé, ses racines poussant de nouveaux rejets (aux deux sens), ou, pour varier les métaphores, a "repris du poil de la bête" (« Le ventre est encore fécond, d'où a surgi la bête immonde »… si cette citation de Bertold Brecht désignant le nazisme vous semble too much, contentons nous du voltairien "l'infâme".) Si bien que c'est autant la part athée que la part cureton de notre société qui se sent perturbée par cette intrusion de l'islam en son sein même. Et avec un petit supplément d'irritation pour les athées qui se voient emmerdés et par l'islam et par les reliques chrétiennes dont ils s'étaient arrachés, non sans effort… et donc, en résumé, emmerdés par les religions quelles qu'elles soient, les religieux de tout poil (de barbe), "la religion" dans son ensemble et dans son principe même : le monothéisme, les monothéismes. Surtout quand on constate que les hiérarchies de religions prétendues différentes et antagonistes s'entendent en fait comme larrons en foire du trône (de Saint Pierre). C'est que finalement, pour eux (comme pour nous – voir article pénultième), le dogme, le contenu de la foi, ils s'en foutent : la puissance est dans "la religion" en soi, tous sous l'égide du principe monothéiste.
L'athée qui se contentait de pécher par omission (a-thée = pas de dieu chez moi) se retrouve poussé au combat, forcé de devenir athéiste (= militant plus ou moins effervescent de l'athéisme), voire antithéiste = combattant toutes les religions. On me dira qu'il pourrait rester tranquillement athée dans son coin, sur le principe de tolérance, du type « Faites ce que vous voulez, adorez Vichnou ou Jésus ou Nanabozo le Grand Lapin, nous on s'en fout. » L'ennui, c'est que les croyants, les religieux, la religion, on ne peut plus se contenter de s'en foutre, de faire comme s'ils n'existaient pas, dans la mesure  où ils sont actifs, activistes, exigeants, veulent, sinon se faire aimer, du moins se faire entendre, voire se faire obéir, occuper la place, être non seulement admis mais influents, marquer la société de leur autorité, de leurs lois, imposer leurs mœurs. En bref, faire chier le monde. Type la "manif pour tous", les pro-life anti-contraception anti-avortement anti-euthanasie obéissant toujours à l'archaïque "croissez et multipliez". Type les prières de rue et… les assassinats et attentats aveugles au nom d'Allah le bon, le miséricordieux et de son prophète qui ne l'est pas moins.
Sans omettre les pratiques personnelles ou familiales. Qu'ils ne veuillent pas manger de porc, fumer ou boire du vin, on n'a rien à dire contre ça, on peut, au nom de la liberté, s'en foutre (sauf si on est éleveur, buraliste ou vigneron… y a du manque à gagner). On peut même approuver pour raisons de santé. Mais… la circoncision, l'excision, le bâchage des femmes, le patriarcat machiste brutal, l'homophobie, la pédophilie, les archaïsmes médicaux (refus de la contraception, des transfusions, des examens gynécos hommes), le jeûne du ramadan imposé à des gamins de dix ans en pleine canicule, l'abattage des animaux de boucherie sans anesthésie… et eux aussi anti-contraception anti-avortement anti-euthanasie obéissant toujours à l'archaïque "croissez et multipliez". J'en passe surement et je ne vise pas que l'islam, mais il faut avouer que c'est lui qui fait le plus de bruit.
Un certain nombre des pratiques religieuses dites privées ne peuvent pas, au nom de nos valeurs athées, nous laisser indifférents et supposent donc un combat (intellectuel).
C'est que, oui, il y a des valeurs athées. Les mêmes qui nous font combattre la torture, la peine de mort, le cannibalisme, l'esclavage, les violences faites aux femmes et aux enfants, les totalitarismes, les racismes… toutes pratiques qui ont toujours fonctionné main dans la main avec les religions. (— Le cannibalisme, tu es sûr ? — Ben… communier de la chair et du sang de Jésus, qu'est-ce que c'est ? — D'accord, mais "bouffer du curé" ? — Ça, j'ai arrêté, c'est indigeste.)
L'athéisme est même la plus fière expression d'une éthique bien supérieure aux morales, moralismes et moralités issues des religions. Disons "une éthique républicaine, humaniste, universaliste" et n'en parlons plus (pour le moment).



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