LO N° 334 (11/11/09) (Vivement 2011, qu'on puisse taper que des 1)
Etant donné l'approche du grand sommet climatique de Copenhague, comme par hasard, on voit ressortir les NÉGATIONNISTES CLIMATIQUES.
Et moi je ressors quelques articles capturés en 2007, en particulier à l'occasion d'un N° de Courrier International. (N°881, sept.07).
On y apprend "Comment travaille le lobby des sceptiques", essentiellement à faire revenir le réchauffement climatique au stade d'hypothèse théorique et non de réalité. Semer le doute… ça suffit… exactement comme les fabricants de cigarettes l'avaient fait pour la recherche sur les méfaits du tabac. Ça marche. Il suffit de quelques petites phrases (reprises par les médias) "la recherche n'en est qu'à ses débuts", "il n'y a pas de consensus"… "le GIEC, ce n'est pas des vrais savants, juste des compilateurs"… "Nicolas Hulot est nul" (dixit Clallègre), "la communauté des chercheurs est divisée"… (Exactement le même discours que sur les OGM > voir dans la prochaine LO l'article de Le Boucher). Et puis pour finir, quand ils sont à cours, ils sont capables de dire : "Même si c'est vrai que le monde chauffe, même si c'est vrai que les hommes en sont responsables, il n'y a pas de quoi s'inquiéter, on aime bien la chaleur, demandez aux Inuits, ils sont tout contents… Et puis on va pouvoir naviguer dans l'Arctique, etc. Et puis de toute façon on n'y peut rien."
Et l'ennui, c'est que c'est pas faux. Comment agir contre le réchauffement climatique ? En fait, on n'en sait rien ! Il ne suffit pas de démonter les arguments des sceptiques, il ne suffit pas de s'engager dans un beau discours à réduire les émissions de gaz à effet de serre de tant % d'ici telle date. Le dire, c'est bien, mais comment le faire ? En fermant la lumière quand on sort d'une pièce, en ne laissant pas couler le robinet quand on se brosse les dents, en roulant électrique ? Au mieux nous pouvons essayer de limiter les émissions de gaz à effet de serre ou, plus exactement, de limiter l'augmentation des émissions. (Parce que globalement, depuis qu'on en parle, non seulement les émissions continuent mais elles continuent d'augmenter.)
Quant à la capture et le stockage du CO2 (CSC), je l'ai déjà évoquée négativement dans la LO N°332 et la lecture de Hervé Kempf me le confirme. Dans "Pour sauver la planète, sortez du capitalisme", il parle de la plateforme norvégienne Sleipner A, qui extrait du gaz du fond sous-marin… et qui travaille à débarrasser ce gaz d'une bonne partie de son CO2 en excès et le réenterre, le réinjecte dans les cavernes sous-marines. Mais cette technique, ajoutée au fonctionnement général de la plateforme, est très coûteuse en énergie. Finalement, la plateforme-usine, pour un million de tonnes de CO2 qu'elle séquestre chaque année, en émet 900 000 tonnes… Le bénéfice est ridicule par rapport à l'enjeu.
Et pendant de temps les centrales thermiques à charbon se multiplient… (Et avec ça Kempf ne croit pas plus en les éoliennes, ah la la…)
Il y a un problème de masse : si maintenant, là, tout de suite, on jouait à fond éoliennes, biomasse, solaire, voitures "vertes", nucléaire, isolation de l'habitat, même si on faisait tout ça à fond la caisse d'un seul coup dans le monde entier (hypothèse carrément fantaisiste), les émissions en 2050 seraient encore au dessus de celles de 2003. Ne serait-ce que parce que le mouvement est lancé depuis longtemps et continue sur son élan, quoiqu'on fasse. Pour vraiment corriger le tir, il faudrait pouvoir retourner de 150 ans dans le passé et étouffer dans l'oeuf la société industrielle.
Reste l'incantation à la "recherche et développement". Ouais, quand on voit le temps et les frais engagés pour mettre au point le Pelamis qui produit modestement de l'électricité avec la houle, et qui a toutes les chances d'en rester au stade expérimental……
Et là, un article du Washington Post est assez fendard dans son genre en ce sens qu'il avoue carrément : nous n'avons tout simplement pas de solution à ce problème. Article le plus pessimiste du lot, en fait : les autres font preuve d'indignation, moralisent, accusent les uns et les autres, ou récusent les arguments des négationnistes, c'est toujours bon à prendre, mais n'apportent pas de solutions. Lui il dit : c'est pas la peine de s'indigner et d'accuser, de toute façon y a pas de solution ! Ce parfait pessimisme (réalisme) me semble la seule attitude possible, et surtout la seule susceptible de changer les choses.
Et déjà en abandonnant l'option (irréaliste) "les énergies nouvelles propres vont remplacer les énergies sales" pour aborder la vraie question : économiser l'énergie. Par exemple (je me réfère toujours à Kempf), l'Allemagne et l'Espagne, très en pointe pour l'équipement éolien, ont pourtant vu leurs émissions de CO2 augmenter entre 2000 et 2005 (1,2% pour l'Allemagne, 10,4% pour l'Espagne). Dans le même temps, le seul pays d'Europe qui ait réussi à faire baisser ses émissions est le Danemark (–11%), et ce grâce à de réels efforts d'économies d'énergie.
La suite du processus, c'est évidemment de passer d'une société de gaspillage d'énergie à une société d'économies d'énergies. Et "gaspillage d'énergie" et "économies d'énergie" veulent dire "gaspillage de TOUT" et "économies de TOUT". Dit comme ça, ça n'a l'air de rien, mais c'est un bouleversement complet.
Et si "on arrêtait tout" ? Et si on tuait toutes les vaches (qui pètent du méthane) ?
Je continue avec les négationnistes et les articles de ce Courrier International de 2007.
On y apprend que la Nasa se serait trompée dans ses calculs de T° pour la fin du XX° siècle : l'année la plus chaude aurait été non pas 1998 mais 1934… Mais de 0,02°C — ce qui ne veut strictement rien dire (un peu comme quand on nous annonce triomphalement une reprise économique de +0,03% sur un mois. Yeah !). De plus des chiffres sur un an ou même dix n'ont que peu de valeur, on peut toujours les attribuer à quelque cause marginale, ou à une suractivité solaire. Ah, le soleil, il a bon dos le soleil, avec ses tâches et ses variations. Et c'est bien pratique parce que si le réchauffement est dû à l'activité solaire, on n'y peut rien, donc on n'a plus qu'à chausser ses ray-ban et cuire. (Je n'exclus évidemment pas que le soleil joue un rôle ; mais, plus exactement, l'interaction entre le soleil et la quantité de gaz à effet de serre dans l'air.) (En passant, il y a même des Australiens qui disent que le réchauffement est un phénomène à l'échelle de la galaxie ! Mais les Australiens, c'est un peu des extraterrestres.)
Le fait est que les choses ne sont pas simples et unidirectionnelles, comme une courbe harmonieuse sur un graphique. Si les T° montaient chaque année de X°, régulièrement, sans débander, depuis 50 ans, la cause serait entendue. Mais la réalité n'est pas comme ça. La réalité, c'est con !, est toujours beaucoup plus compliquée et garde des zones d'ombre, des pourcentages d'incertitude. Dire ça est d'ailleurs une bonne manière de ne rien faire. Tergiverser. Il y a des montées, oui, des cycles, oui, des redescentes, oui… des "rémissions", un peu comme les fluctuations du prix du pétrole… Et ainsi n'importe quel chiffre, même calculé avec d'autres normes que les précédents, va semer la confusion dans les esprits et donc retarder la mise en œuvre d'une action efficace. Et en ce moment même, c'est bien ce qu'il se passe. On nous sert des chiffres comme quoi les T° ne montent plus, ou que les calculs étaient faux, elles n'ont jamais monté, et même tenez vous bien, elles baissent, fausse alerte, les mecs, tout va bien… sans que pour autant les "nouveaux chiffres" ou les nouveaux modèles expliquent les évènements patents, mesurables et mesurés : la fonte de l'Arctique, le recul des glaciers, la fréquence des épisodes climatiques violents (tornades), etc.
C'est qu'on veut des certitudes. Les "savants" savent, non ? Ou sont censés savoir. Or voilà qu'ils ont de ces coquetteries intellectuelles qui leur font utiliser le conditionnel et dire "il semble que", et "si les choses continuent, il se pourrait que… oh, d'ici un bon siècle, voire plusieurs…" Une sorte de principe de précautions oratoires. Par honnêteté ou par trouille de trop s'avancer et risquer de se ridiculiser. Alors si les climatologues (des spécialistes) sont "largement divisés" sur la réalité du réchauffement climatique et largement divisés aussi sur la responsabilité de l'homme et sa civilisation industrielle, où va-t-on ?
On reste dans l'incertitude et donc……… (Et là, ce "on" désigne fortement les politiques qui vont se rencontrer à Copenhague. Déjà qu'ils ont du mal avec ça, alors s'ils n'ont que des chiffres incertains, ça ne va pas les motiver.)
(Sur un plan anthropologique, et pour expliquer un peu cette faiblesse des capacités de décision, il faut noter que l'époque – XX° + XX° siècle commençant –, celle de la mort de dieu, de la psychanalyse et de la physique quantique, de l'explosion démographique, des génocides de masse et de l'atome… est tout entière placée sous le signe du principe d'incertitude… mais nous ne l'avons pas encore intégré, nous ne savons pas encore comment faire avec… nous en sommes encore à nous référer aux Lumières et au triomphe de la raison raisonnante.)
Pourtant, vient un moment où il faut arrêter de se demander, d'hésiter, de tergiverser. Face au principe d'incertitude, il faut sans doute choisir le pire, la pire hypothèse, comme on l'a fait, ici en France avec la grippA. Et cette démarche (principe de précaution qui apparaît ridicule et clairement dispendieux dans ce cas d'une épidémie moins virulente que la grippe habituelle – je sais que je choisis un très mauvais exemple) prendrait une toute autre valeur face à un danger, éventuel peut-être, mais qui touche l'humanité entière.
1 commentaire:
Est-ce qu'au fond, on ne se serait pas simplement "lassé" du réchauffement climatique, qui serait en quelque sorte passé de mode?
Et puis, c'était trop beau quelque chose qui mette tout le monde d'accord. Il nous faut de la division. C'est plus rassurant!
Pour certains écolos, le thème du réchauffement climatique est devenu trop consensuel en quelque sorte, pas assez rebelle, et donc forcément suspect.
Un exemple ici:
http://www.liberterre.fr/gaiasophia/gaia-climats/generaux/caniculs.html
Et puis, même sans réchauffement climatique, les émanations de CO2 n'ont-ils pas des effets sur la santé? Et donc, ne serait-ce pas une bonne chose de les limiter de toute façon?
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